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Eric Lembembe |
L'assassinat
récent de l'activiste et journaliste Eric Lembembe soulève de nouveau les
questions sur l'homophobie virulente qui secoue le Cameroun depuis quelques
années. Le jeune homme a été retrouvé battu à mort à son domicile. Tout porterait à
croire que le militant très actif pour la défense de la cause des minorités
sexuelles a été victime d’une attaque homophobe.
En
effet, il ne se passe plus un jour sans que les médias ne relatent un incident
ou un problème lié à l’homophobie au Cameroun. Orchestrée par l’Etat et
l’église, cette situation semble être un véritable acharnement lancé à
l’encontre des homosexuels camerounais. Dénonciation, arrestation, condamnation
et emprisonnement, tel est le lot des tracasseries dont sont victimes les
minorités sexuelles. Malgré les appels lancés par la communauté internationale
pour la protection des personnes LGBTI, les autorités camerounaises font la
sourde d’oreille. Les Homosexuels sont, ainsi, violentés et arrêtés avec
souvent l’approbation de l’opinion publique.
Toutes
ces hostilités affichées envers les gays se font légalement car l’Etat
camerounais considère les relations sexuelles entre personnes de même
sexe comme un délit qui peut être sanctionné par cinq années de prison.
En mars 2012, un séminaire sur le Droit des homosexuels à Yaoundé avec la
coordination de l’Union Européenne a été interdit et la rencontre a tourné à la
bagarre. Le Rassemblement pour la Jeunesse Camerounaise (RJC), une association
homophobe, était à la base du boycott de ce séminaire organisé par un
collectif d’homosexuels. Les responsables du RJC ont fait ce qui est devenu monnaie
courante au Cameroun, la dénonciation. Ils ont informé la police de la tenue
dudit séminaire et ont mobilisé leurs membres afin d’empêcher cette réunion.
Pour la police de Yaoundé, ce séminaire visait la promotion de l’homosexualité.
Il faut
noter que l’opinion camerounaise accuse depuis quelques temps l’Union
Européenne de vouloir imposer au pays une vision positive de l’homosexualité
en cherchant à défendre le Droit des homosexuels. Comme la plupart des
pays africains, le Cameroun déclare que cette forme de sexualité n’est pas
compatible aux valeurs du continent. Toutes les personnes et les
associations qui tentent de parler pour la cause des minorités sexuelles sont
indexées et menacées. La juriste Alice Nkom en est le parfait exemple.
Madame Nkom se bat ouvertement pour la défense des homosexuels au Cameroun
depuis des années. Elle était d’ailleurs parmi les participants du séminaire
qui a avorté à Yaoundé. Certains de ces collègues ont tout simplement
souhaité qu’elle puisse être radiée de la profession. Présidente de L’Adefho,
Alice Nkom est à l’origine d’une campagne de collecte de 10.000
signatures visant à dépénaliser l’homosexualité au Cameroun.
Le code pénal camerounais, en son article 347 bis, stipule ce qui suit : « est puni d’un
emprisonnement de six mois à cinq ans et d’une amende de 20 000 à 200 000
francs CFA toute personne qui a des rapports sexuels avec une personne de son
sexe ».
Pour rappel,
cette vague d’homophobie tire son origine d’une simple déclaration faite par
Monseigneur Tonye Bakot le 31 décembre 2005. Au cours de son
homélie prononcé la nuit de la Saint Sylvestre à la cathédrale de Yaoundé, il
avait déclaré que l’homosexualité était une pratique contre nature, un complot
contre la famille et le mariage. Le lendemain, toute la presse avait relégué le
message et le journal L’Anecdote publia un top 50 des personnalités présumées
gays. Dans cette liste, on retrouvait les noms des ministres, des hauts cadres
de l’administration, des vedettes du show-biz, du sport, etc. La presse
camerounaise qualifia même l’homosexualité de phénomène considéré au sein de la
jeunesse comme un ascenseur social.
JW